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Venu à la course à pied autour de la quarantaine après avoir arrêté de fumer, Alain Rinjonneau s’est donné corps et âme pour la course à pied, passant les différents diplômes d’entraineur et de dirigeants. Il forme désormais des élèves envoyés par la FFA, et préside les commissions running de la Charente et de Nouvelle-Aquitaine. Cet été, il a rajouté une ligne à sa déjà riche expérience en donnant la main lors des Jeux Olympiques et Paralympiques.

Comment t’es venue l’idée de participer à l’organisation des JO ?

 

En fait, je n’ai pas postulé. C’est le président de la commission running national, Philippe Pelois, qui m'a contacté il y a un an pour me demander si ça m'intéressait d'être au JO comme officiel, pas comme bénévole ni comme volontaire, mais comme officiel. Il m'a demandé dans un premier temps de ne rien dire, et de ne pas communiquer dessus. Par contre on avait « l'obligation » d'être sur les deux JO : valides et paralympiques. Donc je dis oui ! Après, il y a eu toutes les démarches administratives, photo, etc.

La démarche de Philippe Pelois c'était plutôt pour me récompenser du travail que je fais parce que je suis à la commission running national, je suis officiel logica, classeur, formateur à la fédé...

 

Mais je n’ai pas de réelle fonction sur le terrain, j'ai juste passé récemment ce qu'ils appellent les JURUS, c'est-à-dire chronométreur, starter et juge aux arrivées. Je ne suis pas, non plus, juge arbitre, donc je ne pouvais pas aller suivre la course comment le font mes collègues avec un vélo électrique par exemple.

 

Alors Philippe Pelois m’a dit : "ce sera sur le marathon. Après, les missions, on verra, mais a priori ce sera sur les ravitaillements, le rafraîchissement." Et c’est ce qu’il s’est produit. Ils m'ont mis aux stations de rafraîchissement, c'est à dire les points intermédiaires entre le 5e, 12e, 15e, 20e, 25e. Moi j’étais au 12ème.

Est-ce que vous avez été préparés avant le jour J ?

 

Il y avait des webinaires très régulièrement, mais tous ne me concernaient pas puisqu’ils parlaient de l’athlé traditionnel. Ceux concernant la route ont réellement commencé en juillet.

 

Comment étiez vous pris en charge ?

 

Après avoir fait l’ensemble des formalités administratives, ils nous ont versé un forfait journalier pour manger lors des jours où nous serions sur place. Pour le reste, tout était déjà réservé : train, pass navigo, hôtel. D’ailleurs tous les juges étaient pratiquement logés au même endroit. Pour les paralympiques, par contre, on était logé au village olympique.

Même lors de mon arrivée à la gare Montmarnasse, il y avait une volontaire qui m'attendait avec mon nom, pour me guider. J'étais sur le cul ! Elle m’a orienté vers une autre bénévole qui devait s’assurer que les vêtements qui m’avaient été attribués étaient à la bonne taille. Chemise, polo, pantalon, chapeau, chaussures, coupe-vent…

 

Tu es partie combien de temps ?

 

Pour les JO, je suis parti 5 jours avant, et reparti le lendemain du marathon. Et pour les paras, je suis parti le jeudi, et revenu le lundi également.

 

Comment s’est passée ta mission au ravitaillement ?

 

Il y avait quelques règles assez strictes, comme le fait de ne pas tendre les bouteilles aux coureurs, particulièrement sur le marathon paralympiques pour les non-voyants. Et puis, il y avait des juges arbitres internationaux qui vérifiaient qu’il n’y a pas de publicité sur les gourdes ou ailleurs. Ils prenaient même des photos pour vérifier si on avait le bon dress code du jour.

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On n’avait pas le droit de prendre des photos ou de filmer, et interdiction d’échanger avec les athlètes. On nous disait que l’on n’était pas là pour ça...

 

Pour le reste, c’était très basique, il fallait correctement placer les bouteilles, mettre des jupes avec Paris 2024 sur les tables (sorte de nappes), casser les glaçons que les coureurs allaient se mettre sur la nuque…

 

Est-ce que tu as le temps d’aller voir quelques épreuves ?

 

Oui, une fois. J’avais mon accréditation donc j’ai pu aller voir courir Benjamin Robert notamment. Tu aurais vu le monde qu'il y avait ! Le stade était plein dès 11h du matin. Et le stade de France, c'est 80 000 personnes ! Je peux te dire qu’en 2003, il n’y avait pas autant de monde.

 

Est-ce que tu pouvais aller voir le reste de la course une fois tous les coureurs passés devant ton ravitaillement au 12,5 km ?

 

Bien sûr. C’est comme ça que j’ai pu voir passer Nicolas Navarro. Pour les filles, c’était un peu différent parce qu’il y avait une petite athlète du Bhoutan qui avait été invitée au titre de l’universalité. Elle est passée en 1 heure au 12,50km. Elle a été courageuse parce qu’elle a vraiment couru toute seule, comme elle avait déjà un quart d’heure de retard sur la tête de course en passant devant nous. Mais elle a été au bout quand même ! Elle a fini en 3h40, pour un record en 3h22.

 

L’organisation avait certainement prévu cela, mais est ce qu’il y a eu des couacs de dernière minute ?

 

Oui, la première fois que l'on est venu nous chercher à l’hôtel pour nous amener sur le parcours du marathon, le bus était trop haut pour passer sous l’un des ponts. Du coup, il a fallu faire un détour, faire rouvrir des routes qui avaient été fermées… Au lieu d’arrivée à 5h (du matin) sur place, on est arrivé à 6 heures. Mais l’organisation avait pris de la marge (départ du marathon à 8h), donc ça a été.

 

Mais le plus gros couac, ça a été avant le marathon pour tous. Les organisateurs avaient programmé le marathon masculin le samedi à 8h du matin, le marathon pour tous le soir même, et le marathon femme le lendemain matin. Le problème, c’est que beaucoup de coureurs du marathon pour tous n’étaient pas suffisamment bien préparés. Beaucoup ce sont arrêtés vomir dans les toilettes, parfois dès le 12ème kilomètre ! A 4 heures du matin, une voiture-balai passait récupérer les derniers coureurs, qu’ils aient terminé ou pas. Et ensuite, il a fallu faire venir des gens qui ont changé les toilettes en urgence. Nous, on s’occupait de vider les poubelles et de faire le parcours propre. Une grosse journée pour les bénévoles qui étaient arrivés à 5h du matin.

 

Quels étaient les handicaps concernés par le marathon paralympique ?

 

Dans la même course, il y avait plusieurs marathons avec des départs décalés. Le marathon garçon fauteuil. Eux, ils font des chronos incroyables : 1h30 pour faire les 40 bornes ! Nous, on savait très bien qu'ils ne s'arrêteraient pas au ravitaillement. Ils ont leur ravitaillement avec eux. Et puis, même, s'arrêter, c'est pratiquement impossible de relancer la machine après. Il y avait aussi les déficients visuels. Ceux avec un guide, et ceux qui n’en avaient pas besoin.

Qu’est-ce que tu as pensé du village olympique ?

 

C’est une vraie ville, c’est immense. Très colorée ! À part un bâtiment qui a été rénové, tout le reste était neuf ! Je crois qu’ils veulent en faire des logements étudiants après.

 

La restauration, c’étaient les anciens studios de Luc Besson. La restaurant était ouvert de 6h30 du matin, jusqu’à 1h30 du matin le lendemain ! Là, il y en avait pour tous les gouts, toutes les coutumes. Des distributeurs à volonté de coca, sprint, machin… J’ai vu des gens qui se tapaient des côtelettes avec des frites 8h du matin. Mais bon, pourquoi pas, chacun sa culture.

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On croisait les athlètes paralympiques. Une fois j’ai vu un Britannique arriver à fond la caisse en fauteuil. Au moment où il devait passer la porte, je me suis dit « il va se planter ». Pas du tout ! Il faut voir comment ils enquillent avec leurs fauteuils, les gars !

 

Un peu plus loin, il y avait un stand de La Poste qui proposait de te vendre des vrais timbres à ton effigie. Ils te prennent en photo, et ta plaquette de timbre sort. Et après, tu peux envoyer ton courrier avec. C’est rigolo !

Qu’est-ce qui t’a marqué lors de ces JO ?

 

Aussi bien pour les JO que pour les paralympiques, il y avait beaucoup de bienveillance, de fraternité. Dans le métro, à la gare, partout, les gens étaient là pour vous aider. Une fois, je regardais un plan, un gars de la RATP est venu me voir : « vous cherchez quelque chose, monsieur ? ». Une autre fois fois, c’est un jeune qui balayait qui m’a guidé. Il m’a pris mon téléphone, et m’a montré sur Maps. On ne demande pas plus dans la vie, des fois. Ça m'a fait un bien énorme.

 

On voit beaucoup de vêtements des bénévoles qui se revendent maintenant sur internet. Qu’en penses-tu ?

 

Les gens font ce qu'ils veulent, mais moi ça me choque. Il y a des gens qui vont peut-être dire qu’ils étaient bénévoles, alors que pas du tout. Ils l’auront juste acheté. Si tu veux, tu le donnes à tes enfants, à tes petits enfants, ce n’est pas pareil.

 

Et puis, il y a des communes qui ont récupéré des surplus et qui vont les vendre bientôt. Alors ça m’embête pour ceux qui auront payé ça la peau des fesses, alors que ça va bientôt se vendre à moitié prix.

 

Mais je te confirme que ces vêtements sont très prisés. Il y avait même des vols pendant la remise des vêtements, m’a dit une bénévole. J’ai pu parler un peu avec elle. Elle me disait qu’elle était là depuis le mois de mai pour l’organisation des Jeux !

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Tu as pu croiser des gens que tu connaissais ?

 

Oui, des gens de la Commission National Running, et des juges Charentais. J’ai même passé un peu de temps avec Philippe (Chapt) qui m’a fait visiter les sous-sols du Stade de France. Il y a 800m de couloirs en sous-sol pour permettre aux organisateurs d’aller d'un bout à l'autre du terrain sans traverser au milieu du stade. J’ai appris que Macron était passé par là, la veille. Philippe m’a aussi montré la chambre d’appel, et les vestiaires du stade de France. Apparemment, ils appellent ça « le vestiaire à Deschamps ». C’était un beau cadeau de visiter tout ça.

J’ai également croisé Patrick (Bergeaud) qui m’a dit qu’il venait de passer 4h30 sur un concours (lors des paralympiques). Un peu plus loin, il y avait un gros camion du RAID qui était garé là, au cas où.

 

Un mot pour finir ?

 

C’était un souvenir inoubliable ! Je remercie la FFA de m’avoir offert ça. Je sais que l’on ne vit ça qu’une seule fois, en tous cas, moi, je ne le revivrais pas. Ca m'a fait plaisir. Je préfère que l’on m’offre ça plutôt qu’une médaille. C'est la récompense du bénévolat.

Merci Alain !

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